Space Artist #6 : Angelo Vermeulen, l’art comme outil pour anticiper l’écologie spatiale 16/11/2021 |  4 minutes

J’ai cofondé SEADS (Space Ecologies Art and Design) en 2009. C’est un collectif international transdisciplinaire composé d’artistes, de scientifiques, d’ingénieurs et d’activistes. Les membres du réseau SEADS viennent des quatre coins du monde, par exemple des Philippines, de Russie, d’Iran, de Belgique, du Kosovo et des Etats-Unis. Nous partageons tous une même volonté ; remettre en cause les paradigmes qui existent sur le futur au travers de recherches théoriques comme d’expérimentations pratiques. 

La force de SEADS c’est la communauté, l’échange et la co-création, conçue de manière ascendante. Une méthode qui nous paraît absolument primordiale pour révéler l’intelligence collective et générer de nouvelles visions de l’avenir, plus inclusives et plus diversifiées. C’est pour cette raison que nous travaillons en open-source.

Notre projet « Biodiversity Tower », une sorte de machine à biodiversité créée sur le modèle des hôtels à insectes a d’ailleurs gagné le Prix International d’Art Public (région Eurasie) décerné par l’institut d’art public.

@Angelo Vermeulen @SEADS – Biodiversity Tower

Les installations artistiques constituent la majeure partie de mes créations mais je travaille également avec la photographie, que j’ai commencé à pratiquer en parallèle de mes études ainsi qu’avec la vidéo. J’alterne toujours entre le monde réel, physique et celui des images qui a tendance à m’obséder.

Je ne vois, pour ma part, pas d’opposition entre le caractère scientifique, biologique de mon travail et son aspect artistique et philosophique car toute ma pratique est radicalement transdisciplinaire. Je marie l’art, la science, l’ingénierie et le design. J’ai besoin de cela pour communiquer avec le monde.

@Angelo Vermeulen @SEADS – Seeker

Encore aujourd’hui, lors des missions habitées, les astronautes dépendent de ressources terrestres qu’ils embarquent avec eux pour survivre. Le Space Farming Project part du postulat selon lequel l’autonomie en ressources est une nécessité pour maintenir la vie humaine dans l’espace, notamment l’espace lointain, pendant de longues périodes. Nous étudions la combinaison de l’utilisation de ressources in situ, de recyclage des déchets et de « l’agriculture spatiale ». 

Cette dernière est le cœur du Space Farming Projet. Elle a une vocation critique : de réfléchir à comment fournir aux astronautes voire aux futurs colons de la nourriture cultivée localement et de l’oxygène biogénique. Elle sera d’ailleurs un élément indispensable de tout futur avant-poste dans l’espace lointain. 

Ce défi est central, notamment d’un point de vue biopolitique car l’histoire humaine a prouvé que la colonisation et l’agriculture étaient intrinsèquement liées. Dans les conditions extrêmes et sans précédent de l’espace, cette relation problématique est appelée à créer son propre ensemble d’idéologies et potentiellement de conflits éthiques qui en découlent. À ce jour plusieurs prototypes spatiaux ont été conçus en collaboration avec une communauté diversifiée de technologues bénévoles, de chercheurs agricoles, d’enseignants et d’étudiants.

L’espace est l’un des ultimes mystères. L’autre étant l’origine et la genèse de la vie. S’agissant des avancées technologiques qui entourent et animent le secteur du spatial, je pense surtout aux conséquences sociétales, éthiques et biopolitiques (positives comme négatives) de l’humanité se répandant dans l’espace. À ce titre, ArianeGroup évoque pour moi la capacité future que nous pourrions avoir en Europe d’amener des humains dans l’espace.

@Angelo Vermeulen – MDRS Crew 122

L’exploration spatiale mise à part, j’aime tout particulièrement l’histoire et la philosophie. En réalité, la plupart des disciplines qui composent la science, comme l’ingénierie, l’art ou les sciences humaines sont, pour moi, de potentielles sources d’inspiration. Ce que je sous-entends c’est que j’ai un vaste éventail d’intérêts. Au quotidien, je me nourris beaucoup de l’actualité mondiale mais aussi des expositions auxquelles j’assiste, des conversations que j’ai avec différentes personnes…

En ce qui concerne la matière de mes œuvres, je considère que tout est potentiellement utile car mon travail est d’abord motivé par des questions éthiques et politiques. Ce ne sont donc pas vraiment les matériaux, les couleurs ou les textures qui m’inspirent en premier lieu.

@Angelo Vermeulen @SEADS – Seeker

En nous aidant à replacer les choses dans un autre contexte, l’espace offre une belle perspective. Cela nous permet de distinguer des paradigmes et des politiques sous-jacentes, dans l’art et dans la science.

L’humanité se déplace désormais très activement dans l’espace, et prévoit d’y rester. Pour preuve, différents pays envisagent d’envoyer des gens dans l’espace et d’aller sur la Lune, une nouvelle station spatiale est en cours et le tourisme spatial est un secteur qui se développe rapidement. 

L’espace n’est plus le domaine exclusif des ingénieurs et il ne s’agit plus seulement de maintenir des corps humains en vie dans cet environnement hostile. Nous devons adopter une perspective plus holistique pour concevoir l’avenir de l’espace car tous les autres aspects de la vie humaine font désormais partie intégrante de notre existence dans l’espace : l’architecture, le design, l’écologie, la psychologie et l’art.

Aller dans l’espace !

Retrouvez les œuvres du collectif SEADS sur leur site internet :

et suivez les aventure d’Angelo Vermeulen, l’artiste touche à tout sur son compte instagram :